Fibres respiratoires et irritantes

Les points clés

Dans le domaine HSE, on utilise le terme « fibre » pour désigner une particule allongée qui présente une longueur au moins trois fois supérieure à son diamètre. Il existe deux grandes catégories : fibres inorganiques et les fibres dites organiques.

Les fibres, en fonction de leur composition chimique ou de la présence d’additifs tels que des liants, peuvent causer des allergies cutanées ou respiratoires. Inhaler des fibres peut entraîner des réactions inflammatoires, tant au niveau des bronches qu’au niveau des alvéoles. Si ces fibres migrent jusqu’à la plèvre, l’enveloppe du poumon, elles peuvent provoquer un épanchement pleural.

Les principes de prévention s’appliquent également fibres. Il est essentiel de commencer par identifier les risques associés, puis de prendre des mesures telles que l’élimination des sources émettrices et la substitution ou la réduction du niveau d’exposition des travailleurs, informer et former ces derniers.

LLes fibres sont des agents chimiques dangereux (ACD) au sens de l’article R4412-2 du Code du travail. Les dispositions de la prévention du risque chimique. Des dispositions particulières s’appliquent en fonction de la nature des ACD, dont certaines substances classées CMR de catégories 1A/1B ou 2.

Les fibres, de quoi parle-t-on ?

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Certaines fibres peuvent être inhalées et se déposer dans les parties profondes des poumons, notamment dans les alvéoles pulmonaires. Ces fibres ont généralement un diamètre inférieur à 3 microns, ce qui représente environ un dixième de l’épaisseur d’un cheveu.

Les fibres peuvent être classées en deux catégories en fonction de leur composition chimique : les fibres organiques, composées de carbone et d’hydrogène, et les fibres inorganiques.

Les fibres organiques sont composées de carbone et d’hydrogène. Elles peuvent être soit naturelles, comme la cellulose, la soie ou le lin, soit artificielles, dérivées de la cellulose, telles que la viscose et l’acétate de cellulose. Il existe également des fibres synthétiques, dérivées de produits pétrochimiques, comme le polyester et le polyéthylène. Certaines de ces fibres sont plus connues sous leurs noms commerciaux, tels que le Kevlar et le Nylon.

Les fibres inorganiques peuvent être soit naturelles, comme l’amiante, soit synthétiques, comme les laines minérales d’isolation, les fibres céramiques réfractaires et les fibres de carbone.

Parmi les fibres inorganiques synthétiques, on peut distinguer plusieurs familles, dont l’une est communément appelée « fibres minérales artificielles » dont les fibres céramiques réfractaires.

 

Fibres organiques 

Fibres naturelles :

  • Cellulose
  • Coton
  • Lin
  • Chanvre
  • Soie
  • Laine

Fibres synthétiques  : 

  • Aramides
  • Polyester
  • Polyvinylalcool
  • Polypropylène
  • Polyéthylène
  • Polyamides

Fibres  artificielles : 

  • Viscose
  • Acétate de cellulose

Fibres inorganiques : 

Fibres naturelles : 

  • Amiante
  • Wollastonite
  • Sépiolite
  • Basalte

Fibres synthétiques : 

  • Laines minérales d’isolation
  • Fibres céramiques réfractaires
  • Microfibres de verre
  • Fibres de carbone
  • Fibres d’alumine
  • Whiskers

Fibres céramiques réfractaires : 

Les fibres céramiques réfractaires sont des fibres artificielles en silicates vitreux, présentant une orientation aléatoire, et contenant moins de 18 % d’oxydes alcalins et alcalino-terreux en poids.

Ces fibres, appelées FCR, sont spécialement conçues pour des applications à des températures supérieures à 1 000 °C. Elles ont une apparence blanche et cotonneuse, avec un diamètre compris entre 1 et 3 microns.

Elles servent principalement aux isolations thermiques des hautes températures.

Contrairement aux fibres d’amiante, elles ne se divisent pas en fibrilles de diamètres plus petits, mais se cassent transversalement. Elles ont une très faible solubilité dans les milieux biologiques, ce qui les rend hautement persistantes dans l’organisme. À des températures supérieures à 1 000 °C, elles peuvent former de la cristobalite. La silice cristalline inhalée, qu’il s’agisse de poussière de quartz ou de cristobalite, est classée comme cancérogène CMR.

Les fibres céramiques réfractaires sont classées cancérogènes de catégorie 1B

En quoi les fibres sont néfastes ?

Effets des fibres sur l’appareil respiratoire :

La taille et la longueur des fibres jouent un rôle crucial dans leur interaction avec l’appareil respiratoire.

Les fibres fines et longues ont une plus grande capacité à pénétrer profondément dans les poumons, ce qui rend leur élimination par l’organisme plus difficile et augmente leur potentiel de dangerosité.

Les fibres inhalées peuvent provoquer des réactions inflammatoires au niveau des bronches (bronchite) et des alvéoles (alvéolite). En cas de migration des fibres jusqu’à la plèvre, l’enveloppe du poumon, elles peuvent causer un épanchement pleural (pleurésie).

L’inhalation répétée de certaines fibres peut entraîner le développement d’une fibrose pulmonaire, caractérisée par une transformation irréversible du tissu pulmonaire qui conduit à une insuffisance respiratoire. Dans certains cas, cette fibrose peut continuer à évoluer même après la fin de l’exposition. La migration des fibres jusqu’à la plèvre peut également provoquer une fibrose pleurale locale (plaques pleurales) ou diffuse (épaississement pleural diffus).

Effets des fibres sur la peau et les muqueuses :

Les fibres peuvent provoquer des irritations de la peau et/ou des muqueuses, en particulier celles dont le diamètre dépasse 4 microns. Selon leur composition chimique ou la présence d’additifs tels que des liants, les fibres peuvent également causer des allergies cutanées ou respiratoires.

 

Conséquences à long terme et risque de cancer :

La présence de fibres dans les cellules peut perturber les divisions cellulaires et entraîner des mutations génétiques. À long terme, certaines fibres, notamment les fibres d’amiante, peuvent provoquer des cancers, principalement au niveau des poumons et de la plèvre. 

La forme des fibres joue un rôle crucial dans leur potentiel de dangerosité. Comparées à des particules non-fibreuses de composition chimique identique, les fibres allongées sont considérées comme plus dangereuses.

La biopersistance fait référence à la durée pendant laquelle les fibres restent dans le poumon. Certaines fibres ont une capacité plus élevée à résister à l’élimination naturelle de l’organisme, ce qui entraîne une rétention prolongée dans les voies respiratoires et augmente ainsi leur potentiel nocif.

L’amiante par exemple a une biopersistance très élevée, combinée à sa forme particulière explique pour grande partie son extrême dangerosité.

Quelle prévention appliquer face aux fibres ?

1 – Evaluer le risque 

Pour prévenir efficacement les risques associés fibres, il est primordial de mener une évaluation complète des dangers et des conditions d’utilisation. Voici les principaux aspects à prendre en compte :

A – Identifier les dangers : consiste à recueillir des informations sur la nature chimique des fibres, leurs dimensions et les procédés de travail associés. Il est essentiel de connaître ces caractéristiques pour évaluer les risques et mettre en place des mesures de prévention appropriées.

B – Évaluation de l’exposition des travailleurs :
Cette étape consiste à évaluer la nature et l’importance des risques pour la santé et la sécurité au travail. Cela implique d’analyser les procédés appliqués, les modes de travail, la durée et la fréquence d’exposition afin de déterminer les mesures de prévention nécessaires.

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2 – Supprimer le risque

Substituer des produits dangereux : Il convient de rechercher des alternatives moins dangereuses afin de remplacer les produits dangereux existants. Remplacer un produit CMR par un produit qui ne l’est pas est un impératif renforcé. Il peut être aussi envisagé d’utiliser des systèmes clos et des techniques automatisées pour réduire les émissions de fibres.

3 – Réduire le risque 

L’objectif consiste à réduire au maximum l’exposition des travailleurs. Cette réduction peut être réalisée en mettant en place :

A – Protection collective et mesures organisationnelles :

  • Mettre en place une ventilation locale pour capturer les fibres à la source. La ventilation générale peut être envisagée lorsque la ventilation locale n’est pas possible.
  • Travailler à l’humide lorsque cela est réalisable pour réduire la formation de poussières.
  • Éviter les découpes et privilégier l’utilisation de matériaux prêts à poser ou prédécoupés. Si des découpes sont nécessaires, les effectuer sur une table aspirante.
  • Délimiter, signaliser et restreindre l’accès aux zones de découpe et d’usinage.
  • Déballer les fibres au dernier moment et au plus près du lieu d’utilisation.
  • Maintenir la propreté de la zone de travail en utilisant un aspirateur équipé d’un filtre à très haute efficacité ou en effectuant un nettoyage humide avec de l’eau et un détergent.
  • Éviter l’utilisation de la soufflette à air comprimé et du balai.
 

B – Contrôler les mesures mises en place

Il est essentiel de surveiller régulièrement l’efficacité des mesures de prévention mises en place. Cela peut impliquer des contrôles périodiques de la concentration en fibres au poste de travail et la vérification de l’état de fonctionnement des installations et des équipements de protection collective.

 

C – Informer et former les collaborateurs :

Les employés doivent être informés des risques liés aux fibres, des mesures de prévention mises en place et de l’utilisation correcte des équipements de protection individuelle. Une formation adéquate contribue à sensibiliser les travailleurs et à réduire les risques d’exposition..

4 – Le port d’équipement individuel – EPI

Lorsque les mesures de protection collective sont insuffisantes, fournir aux travailleurs des équipements de protection individuelle (EPI) adaptés aux fibres, tels que des vêtements de protection, des gants, des lunettes de sécurité et des masques respiratoires appropriés. Une formation adaptée doit être nécessaire. 

Que dit le socle réglementaire ?

La prévention de l’exposition aux fibres relève des dispositions réglementaires du Code du travail concernant la gestion du risque chimique.

Le terme « agent chimique dangereux » (ACD) est utilisé pour désigner tout agent chimique considéré comme dangereux selon la classification européenne. 

Il englobe les substances et mélanges répondant aux critères de classification relatifs aux dangers physiques, pour la santé ou pour l’environnement, tels que définis dans l’annexe I du règlement CLP (règlement (CE) n° 1272/2008 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 modifié). De plus, un agent chimique peut être considéré comme ACD s’il présente un risque pour la santé et la sécurité des travailleurs en raison de ses propriétés physico-chimiques, chimiques ou toxicologiques, même s’il ne satisfait pas aux critères de classement. Cela inclut également les agents chimiques pour lesquels des décrets prévoient des valeurs limites d’exposition professionnelle (article R. 4412-3).

Selon cette définition, les fibres peuvent être soumises aux dispositions applicables aux ACD, même si la substance qui les compose n’est pas classée comme ACD au niveau européen. Les articles R. 4412-1 à R. 4412-57 du Code du travail s’appliquent dans ce cas.

Certains agents chimiques sont soumis à des valeurs limites d’exposition professionnelle réglementaires contraignantes ou indicatives qui sont réglementés respectivement par les articles R. 4412-149 et R. 4412-150.

 

De plus, certains solvants sont soumis à des dispositions spécifiques aux agents chimiques CMR (cancérogènes, mutagènes, reprotoxiques). Les articles R. 4412-59 à R. 4412-93 du Code du travail définissent les substances ou mélanges classés comme CMR de catégorie 1A ou 1B selon le règlement CLP, ainsi que les substances, mélanges ou procédés définis comme cancérogènes par arrêté. 

Les fibres céramiques réfractaires classées comme cancérogènes sont les seules à avoir une valeur limite d’exposition professionnelle réglementaire spécifique contraignante, conformément à l’article R. 4412-149 du Code du travail. Pour d’autres types de fibres, des valeurs spécifiques ont été définies par des circulaires du ministère chargé du Travail, mais elles ne sont pas réglementaires.

Pour certaines fibres, il est possible de se référer aux concentrations établies pour les poussières présentes dans les locaux à pollution spécifique, conformément à l’article R. 4222-10 du Code du travail.